Avant de m’engager au PS, mon cœur a longtemps balancé pour le Verts. J’ai démarré mon action militante concrète avec la campagne Européenne de 2009 en assistant à un meeting du PS animé par le premier fédéral du Loir et Cher de l’époque, Pascal Usseglio, et Karine Gloanec-Maurin, élue d’une petite commune du Nord du département, devenue aujourd’hui députée Européenne. Je me souviens d’un premier contact chaleureux aussi bien avec eux qu’avec les militants locaux. Comme chacun sait, cette campagne 2009 aboutit à un score historique de 16% des Verts emmenés par Dany Cohn-Bendit et à un score à peu-près équivalent du PS, en recul donc. Deux ans plus tard, en 2011, j’ai pris ma carte au PS alors que tout semblait me pousser vers un engagement à EELV. J’ai d’ailleurs, en parallèle de ma participation aux primaires citoyennes et de mon vote pour Arnaud Montebourg, participé à la campagne des primaires EELV où j’ai soutenu Eva Joly. Je me suis ensuite pliée au résultat du vote de mon parti et ai fait la campagne de François Hollande sans aucune arrière pensée. Le déroulement du mandat a évidemment provoqué chez moi de nombreuses interrogations et indignations. Tout d’abord, sur les positions tactiques des uns et des autres, y compris du candidat que j’avais soutenu à la primaire citoyenne, et de celui que j’allais soutenir ensuite à la primaire 2017, je veux parler de Benoit Hamon. Je veux évacuer cet aspect tout de suite pour clarifier ma position vis à vis de ces ex-candidats : Jamais, je dis bien jamais, je ne pourrai leur pardonner que les considérations tactiques l’aient emporté sur les idées ou les convictions.
Ces fautes nous ont conduit tout autant dans le mur que le mandat très approximatif de Hollande chez qui nous savions ne pas devoir attendre grand chose en terme d’avancée des idées de gauche sociale.
Alors que faire désormais ? Nous avons pris conscience de l’urgence écologique. Nous avons même ajouté la mention “social-écologie” au logo du partie. Fort bien. Mais à l’heure actuelle, le trait d’union qui relie social et écologie ressemble plus à un “ou” à valeur exclusive qu’à un “et” inclusif. Si nous sommes capables de proposer des solutions concrètes en matière sociale ou en matière écologique, nous sommes, pour l’heure démunis pour lier les deux aspects.
La crise des Gilets Jaunes, est pour moi, la démonstration éclatante de notre échec à mettre en place des mesures sociales et écologiques. Évidemment, nous ne sommes plus au gouvernement. Mais nous pouvons agir au niveau local avec tous nos maires, présidents de communautés de communes et d’agglomération, présidents de département et présidents de région. Je suis en effet convaincue de la force de l’échelon local notamment en terme de mobilité, qui est pour moi la problématique. Je devrais plutôt employer le pluriel et parler de mobilités géographique et sociale. Chacune peut s’envisager sous le prisme du choix ou de l’absence de choix. En tout cas en apparence. La contrainte économique va pousser des citoyennes et des citoyens à quitter les quartiers chers (souvent des centre-villes mais pas toujours), pour des zones économiquement plus accessibles en apparence : les banlieues ou les zones rurales. Cette sorte d’exode urbain nous a d’ailleurs été présenté comme la panacée depuis le dernier quart du siècle dernier contre la vie chère et la pollution (premier terme écologique que je me souviens avoir entendu après Brigitte Bardot et ses combats pour sauver les éléphants entre autres…sic). On nous vendait donc avec ce retour à la campagne un logement moins cher, une vie plus proche de la nature et plus saine pour les enfants. Bref, pour un peu, on se serait cru dans l’application de la thèse sur la Frontière de Frederick Jackson Turner qui prône un retour à la nature préalable et inhérent à la conquête de l’Ouest américain. Pour autant, nous savons aujourd’hui à quel prix cette conquête a eu lieu en terme humain et écologique. Cette conquête de nouveaux espaces n’a pour autant pas tenu toutes ses promesses en termes économiques : les zones reculées ne fournissent ni les emplois, ni les services publics. Pour les seconds, elles ne les fournissent plus. Il faut donc conserver ou accepter un emploi loin de chez soi et s’y rendre le plus souvent avec sa voiture. Il existe quelques exceptions avec des villes moyennes dotées d’une gare TGV; je pense notamment à Vendôme, à 43 minutes de Paris. Mais l’abonnement n’est accessible qu’à une toute petite minorité de citoyens. Concernant les services publics, l’école a tenu lieu de moteur pour quitter les grandes villes avec leurs classes de maternelle à 30 élèves et leurs places en crèche à réserver un an avant la naissance d’un enfant. La promesse d’écoles maternelles rurales pouvant accueillir les enfants de deux ans a eu un succès certain. Pendant un temps seulement. La présidence Sarkozy a provoqué la fermeture de nombreuses classes et les conditions des classes en milieu rural a rejoint celui des écoles de ville. Passons rapidement sur les services de la Poste : il n’est pas rare de ne recevoir son courrier qu’une fois ou deux par semaine en province. Enfin, concernant la santé, il faut parfois parcourir des dizaines de kilomètres pour se faire soigner ou pour accoucher. Enfin, concernant la pollution, il me semble curieux de penser que l’on va subir moins de pollution atmosphérique quand on en émet soi-même davantage qu’en ville pour se rendre à son travail. Et concernant les villages des zones très rurales, lorsqu’ils sont entourés de champs et de cultures céréalières, on y subit une pollution en terme d’épandage de pesticides qui devrait faire réfléchir à deux fois ceux qui rêvent d’une vie meilleure à la campagne. Enfin, concernant la réduction du stress, il me semble difficile de croire que passer plus d’une heure par jour pour ses déplacements va y contribuer.
Une fois tout ceci exposé, je ne voudrais surtout pas donner à penser que je m’oppose à un mode de vue rural. J’en veux surtout à ceux qui ont laissé croire à une prescription qui conviendrait à tout un chacun.
Comment alors permettre à chacune et chacun de choisir le mode de vie qui lui convient et de lui en donnant les moyens ? En attendant que chacun puisse travailler près de chez lui, ce qui doit être notre objectif à moyen et long terme, travaillons à faciliter cette mobilité géographique quotidienne. C’est ici de l’échelon local dont je souhaiterais parler. Les régions gèrent les TER et les transports scolaires. Les agglomérations, les communautés de communes et dans certains cas les communes elles-mêmes les transports intra et inter-urbains. Si l’on est habitant d’une commune rurale et que l’on travaille dans l’agglomération voisine, si l’on n’a pas le permis, pas de voiture, ou que l’on décide de ne plus l’utiliser, on va probablement utiliser deux types de transport : un bus pour rejoindre l’agglomération et un bus ou un tram pour rejoindre son lieu de travail. Si l’on habite une ville moyenne, on devra probablement prendre un bus pour rejoindre la gare, puis un TER pour rejoindre l’agglo et enfin un bus ou le tram. Si l’on est sportif et que les rames du TER le permettent (merci les régions), on pourra profiter de l’intermodalité avec son vélo ou sa trottinette. Des solutions existent et il faut les saluer. Les limites sont d’ordre tarifaire surtout quand on est précaire, exemple avec des emplois dans des villes différentes ou des cumuls emploi-formation. Sans oublier les demandeurs d’emploi. Je voudrais citer un exemple qui va peut-être en surprendre plus d’un. Il m’a même surprise en tant que native Parisienne et provinciale depuis mon entrée dans la vie active. Le budget transports en commun mensuel d’un provincial est plus cher que celui d’un banlieusard francilien. Pour comparer ce qui est comparable, j’ai demandé à une étudiante de me donner le tarif de sa carte d’abonnement mensuelle pour des trajets Blois-Tours. Cela lui revient à 110 euros alors que le Pass Navigo, plafonne à 75 euros. Il s’agit d’un tarif étudiant, donc social. Ce tarif préférentiel ne concerne donc pas les actifs précaires qui pourront multiplier ce tarif par deux ou trois.
Alors, faut-il être riche pour sauver la planète ? En tout cas, il ne faut pas être totalement pauvre. La priorité me semble donc être de rendre accessibles les solutions écologiques. Ceux qui trouvent utopistes les propositions de rendre gratuits les transports en communs doivent essayer de se mettre dans les chaussures de ceux dont la fin du mois débute le 5 ou le 10. Pour cela, il me semble nécessaire de faire revenir en notre sein des militants moins argentés et de tourner le dos de manière ferme à Terra Nova et consorts qui ont réduit le champ de nos idées et propositions à celui d’un électorat réduit de manière substantielle lui-même, et en terme de nombre et en terme de classe sociale.