Chers camarades, chers amis,
Nous venons de passer des épreuves difficiles. Certains d’entre vous m’ont écrit pour me confier leur désarroi. J’ai essayé de leur répondre en exprimant mon ressenti. Ce désarroi est compréhensible. Le Parti Socialiste de Loir-et-Cher s’est battu du mieux qu’il a pu contre un vent national qui a tout emporté lors des élections présidentielles et législatives. Nos candidats, nos militants, nos sympathisants ont donné beaucoup d’eux-mêmes. Chacun essayant de faire au mieux dans ce contexte. Ils ont connu des fortunes diverses mais loin d’être déshonorantes. Qu’ils en soient remerciés. Il y a parfois des défaites qui préparent aussi l’avenir. Nous avons le droit d’en être touchés, tristes voire même en colère. Mais nous avons aussi l’obligation de nous relever pour mettre en avant nos valeurs, nos idées.
J’ai tenu à attendre le conseil national du parti qui a eu lieu hier pour vous écrire. Je ne voulais pas avoir de paroles creuses qui ne se seraient pas appuyées sur des éléments concrets. J’ai assisté à beaucoup de débats, d’échanges dans une ambiance de gravité palpable. Chacun a réalisé l’importance du moment. Ne nous mentons pas, c’est la survie même du parti qui est en jeu en ce moment. L’heure n’était pas au règlement de compte. Et c’est heureux.
Les points les plus importants abordés ont été la position du groupe PS à l’assemblée nationale vis-à-vis du vote de confiance envers le gouvernement et la feuille de route de l’évolution du PS jusqu’au prochain congrès.
Une quasi-unanimité des membres du conseil national ne souhaitent pas voter la confiance au gouvernement et je m’en félicite. Nous ne pouvons pas nous inscrire dans la majorité présidentielle, notamment pour des raisons de programme économique (réforme du code du travail, suppression de très nombreux postes de fonctionnaires etc.) Pour autant cela ne veut pas dire une opposition systématique et stupide. Le PS a toujours voté pour des textes progressistes, la loi Veil ne serait pas passée sans nous alors que le gouvernement était déjà issu d’un président de centre-droit. Certains des membres souhaitaient laisser à nos députés le choix de s’abstenir d’où le texte final proposé par Cambadélis.
Le deuxième point a lui aussi fait consensus. Tenir un congrès immédiatement aurait sans doute fait exploser le parti. Les rancœurs sont encore vives. Trop de personnes en accusant d’autres d’être aux origines de la défaite. Comme les victoires, les défaites sont collectives. Le congrès sera certainement repoussé au mois de février. Pas trop tard pour ne pas éviter le débat. Pas trop tôt, le temps que la côte de popularité de Macron retombe et que nous reprenions nos esprits. D’ici là une direction collégiale va être mise en place lors du conseil national du 8 juillet. C’est cette équipe qui se chargera du prochain congrès. Je suis néanmoins conscient que cela pose un problème de visibilité médiatique. Mais nous devons aussi parfois délaisser un peu la communication pour nous concentrer sur l’essentiel, les idées.
Les autres points de réflexion ont été nombreux. En voici quelques idées fortes :
Nous devons fonctionner différemment : Faire plus appel aux militants, aux sections, aux premiers fédéraux. Déconcentrer, ne plus fonctionner de manière verticale. Les dysfonctionnements entre le national et certaines fédérations ont été nombreux. Solférino a parfois donné l’impression de perdre le contact avec la réalité du terrain. La réussite du mouvement « En Marche » est une leçon pour notre parti. Nous avons délaissé des moyens de fonctionnement plus légers, plus efficaces peut être. Cela passera peut être aussi par une réflexion sur les notions de sympathisants, d’adhérent, de cotisation.
Certaines alliances ont été jugées parfois contre-productives, des « alliés » de gauche se comportant parfois comme des adversaires. De notre côté notre comportement n’a pas été idéal non plus. Nous avons eu un problème de discipline, de loyauté, de solidarité. Nous avons parfois surjoué les antagonismes pour nous distinguer alors qu’il aurait fallu nous montrer plus unis. Jouer sa carte personnelle au détriment du collectif et tout sauf proche de l’idéal collectif du socialisme.
L’espace politique pour le PS existe. Le gauchisme populiste non gouvernemental est incarné par Mélenchon. Les dérives plébiscitaires de la France insoumise nous inquiètent. Cette volonté dégagiste antiparlementaire, antieuropéenne, autocentrée sur un gourou est un penchant dangereux pour la démocratie. De l’autre côté, le centrisme libéral prôné par Macron n’est pas notre projet.
Si des points communs existent avec l’un comme avec l’autre notamment au niveau sociétal ou européen ils sont l’un comme l’autre en rupture avec les idéaux du socialisme et de la gauche de gouvernement. Une gauche de progrès social est notre espace politique. Progressiste, européenne, réformiste, sociale, écologiste. Nous sommes moins nombreux, c’est vrai, mais il nous sera aussi plus facile de nous fixer une ligne idéologique. Nous avons abandonné le social au profit du sociétal. On a privilégié les métropoles au détriment de la France périphérique. C’est cet électorat qu’il nous faut reconquérir. Il ne nous faut pas compter non plus sur une sorte de rééquilibrage mécanique qui nous redonnerait le pouvoir (ce qu’a fait la droite au passage) dans cinq ans. Si nous ne nous réformons pas nous ne serons plus là pour être aux responsabilités. La victoire de 2012 était basée aussi sur l’anti-sarkozysme. Mais ne nous mentons pas, la crise était déjà là.
Nous sommes aujourd’hui face à une responsabilité historique. Cela peut faire peur mais c’est aussi un combat exaltant et indispensable pour le bien-être des générations futures. Ne baissons pas les bras, plus que jamais la France a besoin de l’espoir porté par nos valeurs.
Amitiés socialistes.
Frédéric Orain, premier secrétaire fédéral de Loir-et-Cher